[Ce passage est extrait de l'introduction et le contenu rédactionnel d'autres superbe collection John Burnett de la vie ouvrière-histoires, Les Annales de travail: Autobiographies de la classe ouvrière britannique, 1820-1920. Bloomington, Indiana, Indiana University Press, 1974. Traduction par Vanessa Ly, Paris; formatage et liens hypertextes par George P. Landow.]
On croit souvent aujourd’hui que jusqu’à peu, la grande majorité des femmes restaient chez elles, pour effectuer les travaux du ménage et élever leurs nombreux enfants, et que très peu d’entre elles travaillaient pour un salaire. La chose qui a véritablement changé est qu’il y a aujourd’hui plus de femmes mariées et de femmes de la classe moyenne qui travaillent qu’auparavant. Si on considère la taille de la classe ouvrière victorienne (au moins 80% de la population si l’on prend la définition « manuelle » de classe), puis le fait démographique qu’en raison d’un déséquilibre de genre, une femme sur trois était de toutes façons condamnée au célibat, et enfin que les salaires de nombreux hommes peu ou pas qualifiés étaient si bas et si précaires qu’ils ne pouvaient subvenir aux besoins d’une famille sans les rémunérations supplémentaires apportées par les femmes et les enfants, on peut affirmer qu’une grande proportion de femmes victoriennes, mariées ou pas, effectuaient régulièrement un travail rémunéré.
A l’époque victorienne, les femmes constituaient un grand réservoir de main-d’œuvre, utile à une économie en pleine expansion mais encore immature, dont les fluctuations nécessitaient un nombre variable de travailleurs selon les périodes. Il est impossible d’estimer la taille exacte de la population féminine qui travaillait, car les résultats des recensements la sous-estimait très probablement ; le nombre d’ouvrières relevé était sans doute relativement juste, le nombre de servantes peut-être un peu moins, mais les milliers de modistes, couturières, lavandières, tricoteuses, manucures, coiffeuses et toutes les femmes travaillant chez elles, à temps plein ou à mi-temps, ont dû échapper aux recenseurs, notamment par crainte d’amendes si elles déclaraient la totalité de leur revenu. Le recensement de 1851, première tentative de dénombrer en détail les divers métiers existants, a donné les résultats suivants : 2.8 millions de femmes et de filles âgées d’au moins 10 ans travaillaient, sur une population de 10.1 millions de femmes, formant ainsi 30.2 % de l’ensemble des travailleurs (en 1901, cette proportion était de 29.1% puis de 29.8% en 1931 ; il faut prendre en compte l’élévation de l’âge obligatoire de scolarisation à 14 ans pour cette dernière année). En 1851, c’était le service domestique qui employait le plus de femmes (905 000 femmes), sans compter les 145 000 lavandières et 55 000 femmes de ménage. [48-49]
Dernière modification août 10 janvier 2012